Louise Courvoisier, de son village de Cressiat au festival de Cannes avec son premier film Vingt Dieux
Louise Courvoisier cinéaste prometteuse, régionale de l’étape, réalisatrice du formidable Vingt-Dieux, son premier long-métrage, a présenté son œuvre à Lyon en avant-première au cinéma Comoedia. Rencontre.
Louise Courvoisier, 30 ans, prouve, si besoin était, avec son premier film Vingt-Dieux que l’on peut boucler la boucle de la création de cinéma en région, en tournant dans son village et autour à Cressiat dans le Jura, et à 20 minutes de là, à Pont-d’Ain (01).
Le tout avec des acteurs locaux, en ayant étudié à l’école à Lyon, à la Ciné Fabrique, en ayant réalisé la post-production à Villeurbanne, en ayant décroché deux co-productions de régions : Auvergne-Rhône-Alpes, et Bourgogne-Franche-Comté.
Avec cette première œuvre très réussie, encensée par la critique, Louise Courvoisier et ses équipes, excusez du peu, sont parties montrer le film à Cannes 2024 en sélection Un Certain Regard.
Le film a été primé deux fois lors du dernier Festival du Film Francophone d’Angoulême. Il était nommé pour le prix Louis Delluc (finalement décerné à Miséricorde d'Alain Guiraudie).

Vous avez grandi dans les territoires où se déroule le film, qu’avez-vous ressenti en tournant là-bas ?
J’ai surtout eu peur que le tournage du film ne vienne perturber la vie locale comme une machine industrielle qui e et qui repart. J’avais envie de soigner notre arrivée dans la région, et que les gens des équipes dont certains venaient de Paris, puissent se mélanger avec les locaux, j’ai travaillé avec mes deux sœurs, mon frère, ma mère et un peu mon père. Tous ont permis de faciliter les échanges. Le film est une affaire de famille.
Comment êtes-vous venue au cinéma ?
Je voulais partir de mon village, j'ai choisi un lycée qui me permettait d'aller en internat grâce à l'option cinéma, puis cela m'a plu, j'ai intégré l'école Ciné Fabrique à Lyon, et c'est en faisant que j'ai découvert le cinéma et l'idée de créer un film.Cela m'a pris cinq ans entre l'idée du film et sa sortie.
Vous avez des références en tête en termes de cinéma ?
J’aime beaucoup Ken Loach, qui a le talent de mélanger la réalité de la vie dure des personnages sans misérabilisme et n’a pas peur d’introduire de l’humour dans ses films. Et pour Vingt Dieux, je pensais beaucoup au genre western.
Tourner avec des comédiens non professionnels s’est imposé comme une évidence ?
Je ne sais pas du tout si mon prochain projet sera avec des comédiens non professionnels, mais je ne me voyais pas faire autrement sur ce film. J’avais besoin de cet accent, j’avais besoin d’y croire pour que tout le monde y croit, je viens de là-bas et je n’envisageais pas de tricher là-dessus.
Et puis je voulais cette rencontre entre le public et les gens de là-bas. Les jeunes sont tous agriculteurs ou en lycée agricole. Ils sont tous retournés à leur vie sauf un, Mathis Bertrand qui joue Jean-Yves, le meilleur ami de Totone, qui se lance dans le cinéma. Je ne voulais pas non plus parler du statut des agriculteurs, ce n’est pas le propos, je ne voulais pas m’apitoyer sur le sort de ces « pauvres agriculteurs », d’ailleurs les personnages sont durs entre eux et ne se plaignent jamais, en particulier la jeune agricultrice dont on voit qu’elle se lève à 5 heures et travaille jusqu’à 22 heures tous les jours. Ces gens sont dans la pudeur, jamais larmoyants.
On voit beaucoup d’alcool, de bagarres, de conduite en état d’ivresse…
C’est ce que j’ai connu plus jeune dans les bals de campagne, beaucoup de gens se tuent sur la route, ont des accidents, conduisent en état d’ivresse, les jeunes se cassent des bouteilles sur le crâne.
Et la petite fille, Luna Garret qui joue Claire, qui est étonnante dans le film…
Elle est de mon village, je la connais depuis qu’elle a trois ans. Elle a été formidable, elle a un regard puissant et une présence, elle s’est très bien entendue avec les trois garçons et cela a permis de donner du corps avec la relation frère-sœur avec Totone que joue Clément Faveau.
Comédiens non professionnels du cru et animaux du cru également, la scène de vêlage qui prend place dans le film est en conditions réelles ?
Impossible de simuler, nous étions en alerte jour et nuit, prêt à tout arrêter et venir filmer quand la vache allait vêler. La comédienne Maïwène Barthelemy (Marie-Lise) est agricultrice, elle n’a eu aucun mal à tourner cette scène, mais nous avons énormément répété car nous n’avions qu’une seule chance. Il ne s’agissait pas de montrer une pure scène documentaire mais de faire sentir la tension et la concentration entre les personnages.
Vous avez créé et enregistré la musique en famille ?
Oui dans le salon avec nos instruments, violoncelle, contrebasse et voix, avec ma mère et mon frère. Après on a essayé d’enregistrer en studio, mais ça ne marchait plus. La musique était trop propre et lisse, j’avais besoin de ce côté un peu rugueux, brute, façon western, lorsque l’on entend les cordes qui frottent ou résonnent un peu.
Vous avez un projet en cours ?
Je suis à peine au début d’un projet, je ne m’attendais pas à toutes ces récompenses, je pensais que tout s’arrêterait après la projection de Cannes. J’étais déjà heureuse que le film soit fini et qu’il sorte.
Vingt-Dieux, 1h 30, en salle le 11 décembre.
Retrouvez notre critique du film ci dessous :
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