Dollorella, un OVNI d'un romancier à part
Lorsqu’on commence Dollarella, et avant même d’attaquer le roman proprement dit, plusieurs préfaces signés par l’auteur et d’un ami écrivain de l’auteur qui nous précisent le contexte général de l’ouvrage.
Ces pages nous apprennent alors que l’on a affaire à un « thriller politico-narco-économique » écrit par une personne souffrant d’une pathologie mentale : la schizophrénie. Ces mises en garde aiguisent évidemment la curiosité et peuvent aussi éveiller quelques inquiétudes quant à la cohérence de l’intrigue et la lucidité de l’auteur.
Autant avouer que très vite, ces inquiétudes vont en s’accroissant, tant il s’avère très difficile, pour ne pas dire impossible de comprendre l’intrigue de ce roman qui part totalement dans tous les sens : il est vaguement question d’un Milo, agent des services spéciaux, très porté sur les choses du sexe et qui est chargé d’une mission particulière : assurer la livraison de diamants taillés, dissimulés dans des prostituées servant de mules.
Visiblement, d’après ce que je comprends, ce personnage, Milo nous fait part de ces réflexions sur pas mal de sujets différents : la politique (notamment celle des USA sous l’ère de Bush), le narco trafic, l’omniprésence de l’argent dans nos sociétés, et surtout le sexe, qui occupe quand même 90% de son esprit, et qui nous vaut des ages assez gratinées à réserver à un public averti.
Du coup, ces réflexions, assenées en rafale, nous semblent plus ou moins intelligibles, mais celles que l’on comprend ne sont pas dénuées de pertinence et d’humour, de même que les ages très cul sont traversées de certaines fulgurances indéniables (« la bite tendue comme un archet de Mozart »).
Il est évident que l’auteur adore jouer avec les mots, et du coup multiplie les aphorismes, jeux de mots, et poèmes contemporains. Cela contribue à l’originalité du ton d’ensemble, entre onirisme et délire-métaphysique, quelque part entre Fréderic Dard et Michel Houellebecq.
Le problème est que l’instauration de cet univers singulier se fait totalement au détriment de l’histoire : l’accumulation de ces réflexions rend l’ensemble assez indigeste, et surtout parfaitement confus, et en fait, on arrive jamais à vraiment saisir le fil conducteur de l’intrigue et d’ailleurs, tenter de rendre l’histoire cohérente pour ses lecteurs ne semble pas être la préoccupation principale de Marcel Shencker.
En bref, si on arrive à rentrer dans l’univers de l’auteur, le dépaysement et le plaisir est garanti, si on y est totalement hermétique comme j’ai pu l’être, la lecture risque d’être assez éprouvante.
critique également disponible sur le site http://www.les-agents-litteraires.fr/dollarella-marcel-schenker